Dernière mise à jour:
Stessie
… Je descends de
quelques étages, fais des prises de sang, prends rdv avec l’anesthésiste
au cas où ça ne marcherait pas et où il faudrait avoir recours à un
curetage. Je dois aller prendre mes rdv pour la prise des cachets à l’étage
gynécologie-maternité. Je crois que je n’oublierai jamais l’effet que ça
m’a fait d’entendre des nouveaux nés pleurer à ce moment là. J’ai RDV
vendredi après-midi pour la 1ère prise, et je serai hospitalisée lundi
matin à 09h pour la 2ème prise. Il y a plus de 48 heures entre les 2
prises mais selon eux ça n’est pas grave.
Jusqu’à vendredi, je cherche des informations supplémentaires sur
internet, je tombe sur des témoignages effrayants et là j’ai peur.
J’apprends aussi que le 1er cachet peut provoquer l’expulsion.
VENDREDI 14h15: Je suis en avance. On me fait signer un formulaire de
consentement. Et là j’attends jusqu’à 15h45 pour prendre mes cachets.
Allez savoir pourquoi, il n’y avait qu’une femme avec moi. On a le temps
de stresser. Une infirmière finit par m’appeler. Elle me fait entrer dans
une salle d’échographie. Me fait signer des papiers, remplit un dossier.
Je finis par avoir un peu plus d’informations sur le déroulement de mon
avortement. Mieux vaut tard que jamais. Ces premiers cachets (mifégyne,
il y en a 3 à avaler) ne vont pas me faire souffrir mais je vais
certainement avoir quelques saignements dès le lendemain. Ils vont préparer
mon corps et stopper la grossesse. 5 interdictions: pas de bain, pas de
tabac, pas de rapports, pas de tampons, pas d’aspirine.
L’entretien dure à peu près 20 minutes, j’avale mes cachets et je pars.
L’infirmière sera là lundi matin, ça me rassure elle s’est montrée
sympa. Elle m’a dit que je ne verrai rien sortir et que je ne sentirai
rien non plus. Tant mieux! Elle ne me précise pas que le 1er cachet peut-être
suffisant.
Me voilà partie. Je commence à avoir quelques nausées sans vomissements
2 ou 3 heures après et des douleurs qui restent légères. Le soir je me
force pour manger. Mon estomac souffre le martyre (j’ai un ulcère). La
nuit se passe bien. Je ressens tout de même une drôle de fatigue en me
levant. En fin d’après-midi les douleurs s’intensifient et j’ai parfois
des sueurs froides. Je pars dormir chez mon fiancé qui est seul jusqu’au
lendemain soir. Mon père n’étant pas au courant c’était plus simple. Je
n’arrive pas à manger et passe une mauvaise nuit. Le lendemain (dimanche)
mon estomac va mieux mais pas moi. J’ai dormi l’après midi jusqu’à 16h
et j’ai commencé à avoir des pertes de sang très importantes vers
16h30. Les pertes m’obligent à courir vers la salle de bain en serrant
les cuisses car même la serviette ultra n’y resiste pas. ça se passe
comme ça 3 ou 4 fois. J’ai des douleurs très fortes au ventre, en effet
celles des règles douloureuses, mais régulières et espacées. Je ne
comprends pas ce qui est en train de se passer, en fait je ne réalise pas
que mon avortement a lieu. Je me dirige vers la cuisine pour manger
quelque chose, mon fiancé me prend dans ses bras, et me voilà repartie
en courant vers la salle de bain. Je sens quelque chose glisser. Je ne
peux m’empécher de regarder. Et là je percute. Sans savoir à quoi ça
ressemble,je sais que c’est ça. Je pleure instantanément. Je trouve la
force de me lever, de me rhabiller. Je sors en pleurant, mon fiançé
vient me voir et me demande ce qu’il y a. Je lui dis que c’est juste la
fatigue et puis j’arrive à sortir les mots: "ça y est, je l’ai
perdu". Et bien c’est fou ce sentiment de tristesse mélé à cette
bouffée de soulagement. Je me suis sentie vide, à plat, seule mais libre
ou libérée plutôt. Oui je sais c’est horrible. J’ai continué à avoir
des contractions et à perdre du sang jusqu’au lendemain matin.
LUNDI MATIN: 08h30 je suis à l’hopital, on m’installe dans une chambre
que je partage avec une fille de mon âge qui en est à sa 2ème IVG, mais
elle a déjà une petite fille de 2ans. Elle est là depuis hier soir, le
fait par médicaments alors qu’elle est à 10 semaines de grossesse. Là
je ne comprends plus rien, comment est ce possible? Elle souffre et passe
son temps dans les toilettes à se vider.
L’infirmière que j’ai vue vendredi arrive avec les cachets que je suis
censée prendre. Je lui explique que ça n’est pas nécessaire, que je
l’ai perdu la veille. Elle me dit que ça devait surement être des
caillots de sang et que quoiqu’il arrive il faut suivre le
"protocole". Je lui dis qu’on devrait faire une écho pour être
sure. Elle me répond que ça ne servirait à rien, qu’elle serait "évasive".
N’ayant pas pour habitude de me laisser faire je lui rétorque que sans écho
je ne prends pas de cachets. Alors elle part énervée voir le docteur.
Elle revient 10minutes après et m’explique très sèchement qu’on va me
faire une écho mais qu’elle ne sait pas quand. Moi je m’en fiche je ne
suis plus à qqs heures près. 30 minutes après je pars faire l’écho me
faisant traiter de "chanceuse" par cette même infirmière, je
m’excuse auprès du médecin pour ma réaction mais je n’ai pas vraiment
eu le choix. Et il confirme ce que je disais, je l’ai expulsé. Il
m’informe que je vais pouvoir sortir. Je retourne dans ma chambre,
l’infirmière revient et s’excuse. Au moins ça. Après la paperasse,
ordonnance pour la pilule, bon de sortie, prise de sang 3 jours avant le
rdv de contrôle. Je vais au secrétariat prendre ce fameux rdv de contrôle
obligatoire, et je ne fais pas attention mais elle me le donne pour le 21
novembre. Alors déjà je n’y serai plus mais surtout c’est entre 14 jours
minimum et 21 jours maximum après l’IVG. Je rappelle dans l’après-midi,
elle maintient que c’est 35 jours après. Me voilà de nouveau obligée de
me battre, de sortir mon formulaire de consentement et de lui lire ce
qu’il y a d’écrit. Ce qui s’avérera payant car je me retrouve avec un
rdv le 29 octobre.
MARDI: Et voilà c’est terminé. Aujourd’hui je suis fatiguée, je continue
à perdre du sang mais comme si j’avais mes règles et NON je ne
culpabilise pas. Je ne compterai pas les mois en disant: il aurait eu 6
mois,il aurait eu un an, il aurait eu deux ans… Il n’est plus là et je
considère qu’il n’a jamais été là, c’était une petite poche qui
certes aurait dû devenir un enfant. C’était mon 1er avortement et le
dernier. Je comprends qu’on ait besoin d’en parler mais je considère
qu’il faut assumer son choix et faire son deuil. J’ai toujours autant
envie d’avoir des enfants, même encore plus qu’avant, mais quand moi je
l’aurai décidé et surtout quand nous serons en mesure de lui offrir une
belle vie et un foyer stable.
J’ai écris ce téloignage car je trouve inacceptable qu’en 2007 les femme
souhaitant avorter soient toujours aussi mal traitées par des médecins
et par toutes ces administrations. S’ils ne veulent pas le faire, qu’ils
ne le fassent pas. Je trouve anormal qu’on soit obligée de chercher des
informations sur internet alors qu’on est censé être prise en charge par
un hôpital. Si je n’avais pas lu que le 1er cachet pouvait suffire à
l’expulsion, je crois que j’aurais vraiment cédé à la panique… Bref
d’énormes progrès sont à faire, aussi bien sur les IVG et surtout les
conditions dans lesquelles elles sont faites mais également sur les
moyens de contraception. On est en 2007 il n’existe pas seulement la
pilule et le stérilet… WAKE UP!
Voilà je vous souhaite bon courage à toutes et svp assumez votre choix et
continuez à profiter de la vie.