Avortement - Interruption de grossesse : Pour le droit au libre choix



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Source: COURRIER USPDA no 54, mai 2001

Les milieux conservateurs lancent le référendum

La tricherie du PDC

Depuis 30 ans, la Suisse parle du régime du délai. Enfin, le Parlement fédéral vient d'adopter une solution de compromis raisonnable. La nouvelle loi décriminalisera l'avortement et permettra enfin aux femmes et aux couples concernés de prendre une décision autonome selon leur propre conscience. Le PDC et plusieurs comités chrétiens-conservateurs en brouille les uns avec les autres ont lancé le référendum.

Pendant de nombreuses années, le Parlement a débattu sur une nouvelle réglementation de l'interruption de grossesse. Des experts ont été entendus, différentes propositions ont été discutées. Comme le veut la démocratie, les tractations ont abouti à un compromis. Contrairement à tous les usages démocratiques, le PDC ne veut pas accepter la décision adoptée, il tient mordicus à son modèle qu'il a copié sur l'Allemagne où la femme est obligée de passer par un centre de consultation contrôlé par l'Etat, avant de pouvoir avorter, et ceci en plus de l'entretien médical.

Une incroyable obstination

Or, par deux fois les deux Chambres ont rejeté ce modèle! Vexé parce que sa proposition n'a pas été retenue, le PDC décida de lancer un référendum. En même temps il a présenté une "nouvelle" proposition parlementaire … avec exactement le même texte que celui qui avait plusieurs fois capoté. Un tel entêtement est incroyable!

Malhonnête

Pour soutenir son modèle, le PDC se sert de faux arguments. En effet il n'est pas question d'une "solution du délai radicale" d'une part et d'un modèle "de protection et de consultation" de l'autre. Le compromis parlementaire prescrit clairement un entretien de conseil approfondi avec le médecin et, pour le médecin, l'obligation d'informer sa patiente sur les services offerts par les centres de consultation existants.

Le modèle du PDC est lui aussi un régime du délai, où il serait vain de chercher le terme "protection". Bien au contraire, c'est de contrainte dont il est question, puisque le PDC veut obliger toutes les femmes concernées à s'adresser, en plus de l'entretien médical, à un centre de consultation. Même si elles ont déjà tout examiné et discuté à fond et si, après mûre réflexion, leur décision est claire.

Les dizaines d'années d'expériences faites en Suède, en Allemagne et en France montrent que la contrainte ne sert à rien. Si une femme a besoin d'aide et de conseils, elle n'attend pas qu'on lui prescrive la marche à suivre. La Suède a su en tirer les conséquences et, en 1996, elle a supprimé la deuxième consultation obligatoire auprès d'un service social.

Méfiance envers les femmes

Le modèle de la consultation obligatoire est l'expression d'une méfiance générale envers les femmes et envers le corps médical. Les femmes sont considérées incapables de prendre une décision responsable sans qu'on fasse appel à leur conscience. Quant aux médecins, on ne les croit pas capables d'exercer consciencieusement leur profession. Avoué ou non, le but de la consultation obligatoire est de faire pression sur la femme pour qu'elle mène à terme une grossesse non désirée.

Pour défendre son idée, le PDC parle aussi des étrangères et de leurs problèmes de langue. Or, ce problème sera le même devant les conseillères que devant le médecin. La solution ne réside pas dans la contrainte, mais dans la mise à disposition de services de traduction.

La clé permettant de diminuer le nombre d'IVG se trouve dans la prévention des grossesses non désirées. C'est là qu'il convient d'investir les fonds publics, et non pas dans des consultations vides de sens.

Les associations professionnelles représentant précisément les personnes qui seraient appelées à effectuer ce genre de consultations rejettent catégoriquement le modèle du PDC. En 1995, lors d'un colloque sur ce sujet, elles arrivaient à la conclusion suivante: "Un entretien ouvert et pertinent ne peut avoir lieu que lorsque la femme elle-même s'y prête volontairement. L'entretien de réflexion vise à renforcer sa propre responsabilité, objectif incompatible avec la contrainte. Les femmes ont droit à avoir accès à un entretien de réflexion, mais cet entretien doit rester facultatif."

La contrainte est dégradante, elle provoque la résistance et, par conséquent, elle dessert le but visé – elle peut même avoir des conséquences psychiques dommageables.

De la poudre aux yeux

Si le PDC pense, qu'une fois le régime du délai rejeté en votation populaire, le Parlement rouvrira aussitôt la discussion sur son modèle, alors que celui-ci a été amplement discuté et plusieurs fois refusé, c'est qu'il a perdu le sens des réalités. Ce qui plus est, ce modèle ne passerait pas le cap d'une nouvelle votation populaire puisqu'il serait contesté tant par les fondamentalistes que par les milieux progressistes.

Ne serait-ce finalement qu'une astuce du parti pour camoufler son retour à des positions conservatrices? En fait, son argumentation ne se distingue guère de celle des comités référendaires fondamentalistes. Par son référendum, le PDC ne fait que soutenir le statu quo qu'il avait pourtant considéré comme inacceptable. En agissant ainsi, il se désavoue lui-même.

Il faut prendre parti

La Conseillère aux Etats Vreni Spoerry fait le point: "Ni le PDC ni la majorité parlementaire ne désirent que la femme prenne sa décision sans avoir eu un entretien de réflexion. … Les deux modèles prévoient l'offre d'une aide à la femme concernée. … Le modèle du PDC n'est qu'une autre variante d'un régime du délai modéré. Aux urnes, il s'agira donc de décider si une nouvelle réglementation, qui accepte la complexité de la réalité vécue, qui offre aux femmes un soutien et une aide dans une situation difficile et respecte leur décision ultime, peut oui ou non entrer en vigueur. Le rejet de la révision de la loi reviendrait à maintenir le régime actuel qui a échoué".

Le PDC et les citoyennes et citoyens doivent se décider: ou bien on respecte la femme en tant que personne majeure capable de prendre des décisions responsables, ou alors on l'assujettit au contrôle de l'Etat et attache plus de valeur à l'ovule fécondé qu'aux droits de la femme. C'est l'un ou l'autre.

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